Les résidus d'abattage favorisent une restauration rapide de la santé du sol après la coupe rase de plantations d'hévéas : suivi diachronique sur deux types de sol contrastés en Côte d'Ivoire
La santé des sols est définie comme la capacité des sols à assurer les multiples fonctions nécessaires au maintien de la stabilité des écosystèmes dans le cadre des contraintes environnementales (Pawlett et al., 2021). Ces fonctions émergent d'interactions complexes entre les paramètres physiques, chimiques et biologiques du sol mais leur fourniture peut être menacé par les pratiques anthropiques. Les plantations d'hévéas (Hevea brasiliensis), première source mondiale de caoutchouc naturel, constituent un modèle pertinent pour étudier l'effet de pratiques agricoles sur les fonctions du sol. Un cycle de plantation d'hévéas s'étend sur 25 à 40 ans et les cycles de replantation s'enchainent sur les mêmes parcelles. La coupe rase et la préparation du terrain (principalement l'andainage et le sous-solage) entre deux cycles culturaux impliquent des passages d'engins lourds dans les plantations commerciales. Ces pratiques entraînent des perturbations importantes du sol. Historiquement, les résidus d'abattage, c'est-à-dire le tronc, les branches, les feuilles et les racines du peuplement coupé, étaient brûlés à la replantation. Aujourd'hui, la pratique la plus courante dans les plantations industrielles consiste à exporter certains résidus d'abattage (principalement le tronc et les branches) pour des valorisations économiques. Compte tenu de la grande quantité de carbone et de nutriments accumulés dans l'arbre tout au long d'un cycle de plantation, cette exportation pourrait être responsable d'une diminution de la santé du sol au fil des cycles de replantation (Perron et al., 2021). La définition de la santé des sols est basée sur la mesure des fonctions du sol liées aux assemblages biologiques (Kibblewhite et al., 2008). Nous avons utilisé Biofunctool® pour évaluer la santé des sols à travers trois fonctions : le cycle des nutriments, la transformation du carbone et le maintien de la structure (Thoumazeau et al., 2019). Biofunctool ® contribue à une approche intégrée de l'évaluation des sols en utilisant des indicateurs fonctionnels du sol, qui prennent en compte les interactions complexes entre les propriétés physico-chimiques et les organismes vivants du sol. Parmi ces organismes, la macrofaune joue un rôle majeur puisqu'elle est directement impliquée dans la fourniture multiples fonctions du sol. Des études récentes montrent que la diversité taxonomique de la macrofaune du sol est particulièrement importante pour soutenir ces fonctions (Delgado-Baquerizo et al., 2020). Nos objectifs étaient : (1) de quantifier les effets de la perturbation résultant de la coupe rase et de la préparation du terrain sur les fonctions du sol ; (2) d'évaluer les effets de pratiques de gestion contrastées des résidus d'abattage et du couvert de légumineuses sur la restauration des fonctions du sol ; (3) d'explorer les relations entre la diversité de la macrofaune du sol et la santé du sol pendant le processus de restauration. Pour cela, nous avons effectué des mesures diachroniques des fonctions du sol juste avant la coupe rase de la plantation puis pendant 18 mois après la replantation, dans deux plantations d'hévéas en Côte d'Ivoire établies dans des conditions 144 édaphiques contrastées (site de la SAPH, argile : 10% ; site de la SOGB : argile : 23%). Le dispositif expérimental, répliqué sur les 2 sites, comprenait 4 traitements répétées 4 fois, comme suit : - R0L0 : traitement contrôle. Tous les résidus d'abattage (R) sont retirés de la parcelle. Aucune légumineuse (L) semée après la coupe rase. - R0L1 : tous les résidus d'abattage sont retirés de la parcelle. La légumineuse Pueraria phaseoloides semée après la coupe à blanc. - R1L1 : tronc retiré de la parcelle. Branches, feuilles et souches restantes. La légumineuse Pueraria phaseoloides semée après la coupe à blanc. Ce traitement est représentatif de la pratique courante effectuée dans la plupart des plantations commerciales d'hévéas en Afrique. - R2L1 : aucun résidus d'abattage n'a été enlevé. Tronc, branches, feuilles et souches laissés sur place. La légumineuse Pueraria phaseoloides semée après la coupe à blanc. Sur les deux sites, la coupe rase et la préparation du terrain ont considérablement perturbé les fonctions de transformation du carbone et du cycle des nutriments et, dans une moindre mesure, la fonction de maintien de la structure. La restitution des résidus d'abattage a permis de restaurer complètement la fonction de transformation du carbone (Fig. 1) et de maintien de la structure, 12 à 18 mois après la coupe rase. En revanche, aucune restauration de la fonction du cycle des nutriments n'a été observée au cours de la période d'étude. La présence de légumineuse a principalement conduit à une meilleure restauration de la fonction de transformation du carbone. Enfin, nous avons mis en évidence des relations fortes (P≤0,001 ; R²=0,62-0,66) entre la diversité de la macrofaune du sol et la santé du sol. Les résultats de cette étude sont cohérents entre les deux sites, malgré des propriétés édaphiques contrastées. Ces similitudes suggèrent que l'ajout de grandes quantités de matières organiques, par les résidus d'abattage et/ou la légumineuse, est essentiel pour favoriser les fonctions du sol et donc pour la durabilité des plantations d'hévéas.
Main Authors: | , , , , , , |
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Format: | conference_item biblioteca |
Language: | fre |
Published: |
AFES
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Online Access: | http://agritrop.cirad.fr/601062/ http://agritrop.cirad.fr/601062/1/Actes-des-Journees-des-sols-TPERRON.pdf |
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