Recherches participatives pour une gestion durable des territoires forestiers

La participation des communautés vivant dans ou à proximité d'une zone forestière à la gestion de l'environnement, appelée " participation locale ", est de plus en plus utilisée pour que la conservation et la planification de l'usage des terres soient plus durables, inclusives, équitables et pertinentes pour les populations locales. La recherche participative appliquée à la gestion de l'environnement est un sujet de recherche, c'est- à-dire une activité scientifique menée en collaboration avec les communautés locales pour identifier et résoudre les problèmes que rencontrent ces communautés lors de la gestion de l'environnement (Cancian et Armstead 2020). C'est aussi une méthode de recherche, c'est-à-dire l'ensemble des outils utilisés pour identifier et résoudre ces problèmes. La recherche participative a été au centre de mon travail au cours des 25 dernières années. Pendant cette période, mes questions de recherche ont été : Comment rendre plus durable la participation des communautés locales à la gestion environnementale ? Comment ces communautés bénéficient-elles de ou sont-elles affectées par la recherche participative sur la gestion des forêts et des ressources naturelles ? Mon hypothèse de recherche est que la participation des communautés à la gestion de l'environnement conduit à une plus grande durabilité de l'action si la motivation des communautés est assurée. Cette dernière dépend des différents avantages potentiels auxquels elles peuvent s'attendre, par exemple en termes de revenus, de droits coutumiers et légaux, de sens des valeurs et de sentiment d'appartenance, ou pour les générations futures. Il y a 4 chapitres dans ce document : 1) Introduction au thème de la participation à la gestion environnementale, selon une perspective de recherche ; 2) Présentation du contexte théorique, en utilisant la littérature développée sur le sujet ; 3) Présentation du cadre conceptuel que j'ai utilisé lors de mes recherches ; 4) Description à travers d'études de cas des quatre périodes de ma recherche sur la participation locale. Pour répondre aux questions de recherche et vérifier l'hypothèse, j'ai organisé mon travail en quatre périodes d'activités de recherche : 1) j'ai étudié la façon dont les communautés locales percevaient et comprenaient leur environnement; 2) j'ai étudié, en utilisant la recherche participative, le rôle que les populations locales pourraient jouer dans la conservation des forêts ; 3) j'ai élargi mes conclusions sur la conservation au sujet plus large de la participation à la planification de l'utilisation des terres; et 4) parce que le suivi est un élément essentiel de la gestion de l'environnement, j'ai étudié le rôle que les populations locales pourraient jouer dans le suivi du couvert forestier, de la biodiversité et du carbone sur leur territoire. J'illustre ces quatre objectifs avec 13 études de cas basées sur des projets de recherche mis en oeuvre tout au long de ma carrière, d'abord en tant que doctorant et post- doctorant, puis en tant que chercheur au CIRAD (La Recherche Agronomique pour le Développement) et CIFOR (Centre de Recherche Forestière Internationale). J'ai 9 travaillé sur ces études de cas lors de mes missions en Indonésie (18 ans), en Éthiopie (4 ans) et en France. Sur la base de ces études de cas, certains résultats et recommandations peuvent être partagés. L'association des communautés locales à la prise de décision peut conduire à plus de durabilité dans la gestion de l'environnement parce qu'il fait sens, d'un point de vue éthique, économique et écologique, d'impliquer les communautés vivant dans ou à proximité d'une zone forestière dans toute décision concernant sa gestion. L'aménagement du territoire, une composante importante de la gestion environnementale, ne peut réussir à moyen ou long terme sans la participation directe des communautés locales. La participation locale est nécessaire, mais sous certaines conditions. Elle ne doit pas être tenue pour acquise, et les décideurs doivent comprendre à quelles conditions les populations locales peuvent participer aux décisions sur la gestion de leurs terres. Les populations locales ont besoin de bénéficier de leur participation, économiquement, politiquement, en termes de régime foncier ou d'utilisation des terres, et spirituellement. La recherche participative peut aider à mieux intégrer les perspectives, les perceptions et l'agenda des populations locales dans la prise de décision. Mais, avant d'envisager la participation des communautés locales à un projet de gestion de l'environnement, les initiateurs du projet, c'est-à-dire les organisations gouvernementales et non gouvernementales, et les scientifiques, doivent : a) Mener une étude de faisabilité qui évalue les motivations et le type d'implication nécessaire de la part des communautés locales. Ce type d'étude peut être fait en plus des études de faisabilité plus conventionnelles, telles que l'analyse des situations économiques, juridiques, de genre, du régime foncier et des moyens d'existence. b) Utiliser si possible des approches alternatives non participatives qui évitent aux communautés locales de perdre leur temps dans la formation, le suivi et la gestion de projets, dans les cas où leur participation n'est pas nécessaire. c) Clarifier avec les communautés locales, lorsque la participation locale est jugée pertinente par l'initiateur du projet, la manière dont l'approche peut leur être bénéfique. d) S'assurer que les communautés locales peuvent refuser de participer. La participation est parfois imposée car elle a un coût politique et social élevé. Les organisations gouvernementales et non gouvernementales, et les chercheurs n'acceptent souvent pas un " non " pour réponse. Les communautés locales devraient cependant pouvoir refuser de participer. Si elles sont impliquées, cela devrait se faire dès le début du processus, dès la conception du projet, et elles devraient être en mesure de révoquer leur décision de participer à tout moment. Ce n'est qu'à ces conditions que la participation locale peut être considérée comme possible. Le cas échéant, tous les autres acteurs (gouvernement local, organisations de conservation, société civile) doivent collaborer avec les communautés locales pour parvenir à une utilisation des terres, une conservation de la biodiversité, et une gestion des terres forestières qui soient plus efficaces et durables. Cette recherche est toujours en cours et mes activités de recherche futures, par exemple sur la restauration des paysages dégradés ou la conservation autonome, devraient apporter une contribution supplémentaire au sujet.

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Bibliographic Details
Main Author: Boissière, Manuel
Format: thesis biblioteca
Language:fre
Published: MNHN
Online Access:http://agritrop.cirad.fr/599726/
http://agritrop.cirad.fr/599726/1/Me%CC%81moire%20HDR%20Boissie%CC%80re_2021.pdf
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