L’énergie, c’est vous
Les énergies renouvelables font désormais partie du vocabulaire courant. Les engins bizarres et farfelus des années 70 ont cédé la place à des dispositifs intéressants à plus d’un titre pour les petits producteurs et agroindustriels. Et l’avenir ? Photo FAOAu large du port de Dakar se dresse une des nouvelles sentinelles de l’Afrique : un phare de navigation. Majestueusement posé au-dessus des vagues, il guide les bateaux vers le port, au-delà de l’ÎIle de Gorée, témoin de l’époque de la traite des esclaves. Ces deux points de repère marquent l’histoire : Gorée de façon effrayante et honteuse; le phare magnifique, parce que des panneaux solaires l’alimentent en énergie. Et ce ne sont pas les fientes des goélands, elles-mêmes une forme de biomasse, qui empêcheront ces panneaux de capter les rayons du soleil. De nouveaux repères de ce genre sont en place dans la moitié des 400 000 villages africains et dans la plupart de ceux du Pacifique et des Caraïbes. Ils sont désormais au premier plan de ce qui, il y a vingt ans, n’était qu’un rêve de plus dans le domaine complexe de l’électrification rurale. Les panneaux solaires et les éoliennes mal positionnés de cette époque gisent à présent comme des jouets inutiles dans le ' cimetière technologique ' des rêves brisés. Mais les temps ont changé et, pendant que le soleil et le vent attendaient patiemment, les ingénieurs ont multiplié les expériences et appris à simplifier la conception et la maintenance de ces équipements. Et les coûts ont diminué. Bien positionnés, les panneaux solaires et les éoliennes se dressent aujourd’hui comme les symboles des énergies renouvelables appropriées, indiquant, comme les phares de navigation, le chemin le plus sûr vers une énergie économiquement adaptée aux zones rurales. L’énergie est la clé de tout À en croire ceux qui cherchent le meilleur moyen d’amener une société au progrès, c’est dans l’énergie que se trouve la clé du développement. D’autres diront que c’est dans l’éducation, dans la santé, la nutrition, le transport, le commerce ou la technologie numérique. De fait, toutes ces options dépendent de l’énergie. L’énergie, c’est la lumière pour les cours du soir, la source de chaleur pour la cuisine, le froid pour les produits périssables, la pompe à eau pour l’irrigation. C’est en permettant la transformation et le stockage des produits qu’une source fiable d’énergie peut apporter une valeur ajoutée considérable à l’agriculture. Il ne s’agit naturellement pas de négliger les besoins d’énergie dans les champs. Pour pomper l’eau, on doit davantage utiliser les énergies éoliennes et solaires. Dans l’agriculture mécanisée, on a besoin d’un accès sûr au carburant, en se passant si possible des combustibles fossiles. Pourtant, dans beaucoup de pays en développement, la production locale de carburants de rechange comme l’éthanol est encore plus loin des planches à dessins que les planificateurs ne le sont du terrain. Les énergies renouvelables ont deux types d’application dans la transformation agri- cole : utilisation directe ou production d’électricité. Les séchoirs solaires sont aujourd’hui d’usage courant pour la transformation des fruits et des légumes dans de nombreux villages. De même, les panneaux de capteurs remplis d’eau absorbent les radiations solaires, même par temps nuageux, réduisant ainsi le besoin de bois ou de charbon dans les fourneaux. Et, naturellement, les fameux petits foyers améliorés connus sous le nom de Jikos en Afrique orientale ou de Ban uk suf au Sénégal, ont permis de réduire considérablement la consommation de bois et de charbon ainsi que les fumées malsaines pour des millions de ménages et de petites entreprises de transformation agricole. Maîtriser les réseaux Il n’y a pas de véritable substitut à l’électricité et il faudra surmonter bien des obstacles pour arriver à alimenter la majorité des villages en énergie. En Ouganda, par exemple, moins de 1 % de la population rurale est connecté au réseau électrique, car le coût élevé des connexions rend économiquement impossible une généralisation de l’électrification. Selon un rapport gouvernemental récent, cet obstacle a conduit à une auto-électrification croissante en milieu rural : les gens utilisent des générateurs diesel et, de plus en plus, des panneaux solaires photovoltaïques. Ce type de scénario est fréquent dans de nombreux pays ACP. Selon le Rapport sur le développement humain 2002 du PNUD, plus de 40 pays utilisent les combustibles traditionnels (principalement le bois) pour plus des trois quarts de leur consommation de combustible. En ce qui concerne l’extension des réseaux électriques nationaux, d’importants progrès techniques ont été réalisés ces dernières années, notamment pour réduire les pertes d’énergie sur des lignes longues de plusieurs centaines de kilomètres. Les réseaux sont également connectés les uns aux autres afin de répartir l’électricité. Un grand projet est actuellement en cours de réalisation pour partager l’électricité produite par le barrage hydroélectrique de Manantali, au Mali, avec le Sénégal et la Mauritanie. Franchement, peu de programmes d’électrification rurale ont la possibilité d’utiliser les réseaux nationaux. Ils doivent plutôt se fonder sur une production locale d’électricité, c’est-à-dire des systèmes autonomes ou des mini-réseaux couvrant les besoins d’une localité. L’électricité provient alors de sources comme les moulins à cannes ; la bagasse de canne à sucre est utilisée ainsi en Jamaïque, à Maurice et en Afrique du Sud. D’autres déchets agricoles, comme les balles de riz ou les cosses de café, peuvent être également exploités. En Ouganda, des systèmes isolés peuvent alimenter des zones relativement denses avec un fort potentiel d’utilisation par les entreprises rurales, ce qui leur permet de mieux servir le marché des villes rurales. Ils tirent leur énergie principalement de mini-équipements hydroélectriques, un secteur en plein essor dans le domaine des énergies renouvelables. Créer la demande Pour les zones clairsemées où les réseaux basés sur des systèmes autonomes ne sont pas viables, de nombreux pays optent de plus en plus pour des systèmes photovoltaïques individuels ou institutionnels. Les cliniques, les écoles, les pensions de famille, les petites boutiques et les personnes plus aisées s’installent dans des bâtiments et maisons équipées en énergie solaire. Pour que la demande atteigne un niveau suffisant, il faut mettre en place des mécanismes d’appui : du crédit pour aider les acheteurs et des subventions ou des prêts pour aider les producteurs locaux à couvrir les coûts initiaux. Il s’agit exactement des mêmes mécanismes que ceux qui ont été instaurés en Europe, il y a vingt ans, pour favoriser le décollage de l’énergie solaire. Ces mécanismes ont également été mis en place pour assurer la propagation des foyers améliorés. De fait, des mesures commencent à être prises dans ce sens. Le récent lancement de l’African Rural Energy Enterprise Development (voir Repères) est un exemple de partenariat public-privé qui vise à donner une impulsion à la production d’équipements destinés à rendre l’énergie meilleur marché et la consommation plus efficace. Si le nouveau Fonds pour l’environnement mondial du système des Nations Unies, qui doit démarrer début septembre 2002 à l’issue du Sommet mondial sur le développement durable, se cherche un domaine d’action prioritaire, l’électrification rurale en est un tout trouvé, tout comme les changements des habitudes de consommation dans le monde industriel et la réduction des émissions de gaz à effet de serre provenant des voitures, du bétail, des rizières et des usines. D’ici trente ans, on aura peut-être mis au point de nouvelles méthodes de production d’électricité, par exemple en couvrant d’innombrables capteurs solaires les grandes zones désertiques des pays ACP et d’ailleurs. Qui sait ? En attendant, si le monde n’est pas en mesure d’apporter de l’énergie aux populations rurales, aidons celles-ci à la produire elles-mêmes. Durablement. [caption] Rien ne remplace la douce chaleur du foyer et ces fours solaires des années soixante ne se sont jamais vraiment imposés. Avec des panneaux solaires sur les toits, un village peut s’éclairer et avoir de l’eau en toute autonomie. [caption] Les fruits séchés s’arrachent sur les marchés et les éoliennes font monter l’eau et les revenus.
Main Author: | |
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Format: | News Item biblioteca |
Language: | French |
Published: |
Technical Centre for Agricultural and Rural Cooperation
2002
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Online Access: | https://hdl.handle.net/10568/62931 https://hdl.handle.net/10568/99673 |
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