Stratégies de survie à l'usage des petites entreprises agro-alimentaires
Lorsqu'une nouvelle affaire démarre portée par un optimisme ardent, ses espoirs peuvent être rapidement réduits à néant quand les choses tournent mal. Le meilleur moyen de limiter le risque d'échec est de planifier soigneusement les étapes, de prévoir des fonds propres pour les inévitables moments difficiles et de ne jamais cesser d'être combatif pour rester au plus haut niveau. Cela n'est jamais aussi vrai que dans le secteur surchargé et très concurrentiel de la petite transformation agro-alimentaire. Si elles réussissent, les entreprises peuvent contribuer à ajouter de la valeur à la production agricole locale, stimuler l'activité hors agriculture dans les zones rurales et favoriser l'essor d'une économie rurale prospère. Au Cameroun, dans le quartier de Koumassi à Douala, le prix d'un épis de maïs cuit peut varier de 50 % en quelques dizaines de mètres. La forte concurrence fait baisser les tarifs à un niveau tel que, d'un point de vue économique, il peut sembler absurde de continuer la vente. Si les investissements immobiliers, en équipement et en conditionnement sont réduits, une faible marge bénéficiaire est supportable, au moins peut-on encore consommer le maïs soi-même. Cependant, dans le cas d'une petite entreprise devant faire face aux échéances d'emprunts, ce type de concurrence aura les pires conséquences. Pour toute nouvelle entreprise alimentaire, le choix du produit est déterminant, mais il n'est en aucun cas le seul point à prendre en compte. Les entrepreneurs en herbe devront s'efforcer de penser aux finances, au personnel, à la formation, à l'approvisionnement en matières premières, à l'emplacement, au conditionnement, à la commercialisation, à la gestion, et à toutes ces petites et grandes tracasseries qui assaillent toute nouvelle entreprise et menacent sa survie. Il faut tout d'abord penser au consommateur du produit final. Il est important de connaître ce dont les consommateurs disposent déjà, quelles sont leurs préférences et si cette demande est satisfaite. Sur un marché déjà occupé, la compétition se jouera sur le prix, sur la qualité ou sur les deux à la fois. De nombreuses affaires ont démarré par la production d'un plat populaire à toute petite échelle, souvent familiale, qui grossit ensuite pour répondre à un accroissement de la demande locale, régionale ou même nationale. Une étude réalisée par le CIRAD pour le compte du CTA montre qu'un produit qui connaît le succès dans une région donnée du pays a de bonnes chances de réussir ailleurs. Au Cameroun, par exemple, certains plats précuits se rencontrent partout, alors que d'autres ne se voient que dans le nord ou le sud du pays. Le premier à introduire un nouveau produit sur le marché aura l'avantage de n'avoir aucun concurrent direct, mais il devra alors convaincre les consommateurs. En matière d'habitudes alimentaires, les régions rurales restent conservatrices, les grands marchés nouveaux se trouvent dans les moyennes et grandes villes à forte croissance où les spécificités régionales se diluent. Les grandes évolutions qui échappent au contrôle des individus peuvent finalement se révéler favorables à l'ouverture du marché. Par exemple, la dévaluation du franc CFA en Afrique de l'Ouest francophone a produit une forte hausse des prix sur les boissons en bouteilles importées, ce qui fournit un avantage imprévu aux producteurs locaux. L'idée de se lancer dans la fabrication locale d'un produit populaire importé peut être bonne, mais la technique de fabrication ne sera pas forcément applicable sans détours. Le pop-corn, par exemple, ne peut se faire qu'avec certaines variétés de maïs pas toujours disponibles localement et qui devront donc être introduites et cultivées spécialement à cet usage. L'arrivée d'une grosse fabrique transformant le même produit ne balaiera pas forcément les petites industries de la région. Une usine qui fabriquait une version déshydratée (en poudre) d'un produit alimentaire artisanal très populaire a échoué parce que sa version était huit fois plus chère et ne pouvait rivaliser ni en qualité, ni en facilité d'emploi. Les questions d'argent Monter une affaire coûte inévitablement de l'argent et l'obtention d'un crédit pour financer l'achat d'équipement, de matières premières, le conditionnement, l'embauche, etc., sera l'un des principaux obstacles à surmonter. Les banques ne prêtent que lorsqu'elles croient au succès de l'entreprise. Une nouvelle entreprise qui ne peut fournir les comptes des années précédentes pour prouver sa rentabilité doit monter un plan de financement, souvent avec l'aide d'un professionnel. Si ce plan convient à la banque, un nantissement sera cependant nécessaire en garantie du prêt. Beaucoup se tournent alors vers leur famille ou leurs amis, ou vers des formules informelles d'emprunt comme la tontine s'ils sont dans l'incapacité de financer leur affaire sur leurs fonds propres. Il est également bon de s'interroger sur la localisation d'une unité de transformation : doit-elle être située près de ses fournisseurs de matières premières ou plutôt à proximité du marché ? Le choix peut également dépendre de la disponibilité d'un local convenable, ou peut-être encore de la fiabilité du réseau fournissant l'électricité. Un grand nombre des personnes interrogées lors de l'étude du CTA/CIRAD ont affirmé que les coupures d'électricité étaient leur problème principal. La capacité de conservation des denrées, qu'elles soient brutes ou transformées, est aussi à prendre en compte. Une unité de transformation devra peut-être limiter sa production, non par manque de clientèle, mais parce que sa marchandise est périssable et ne peut atteindre des marchés éloignés dans un état de fraîcheur suffisant. Cette situation sera d'autant plus vraie que son champ d'action s'amplifiera ; ceux qui sont tentés par l'expansion d'un marché local vers un marché national voient souvent leurs ambitions limitées par un réseau de distribution inadapté. Les entrepreneurs qui réussissent seront vite confrontés à des demandes d'emploi pressantes émanant de parents ou d'amis de la famille, mais pour que cette réussite continue, ils auront intérêt à peser méticuleusement le pour et le contre avant d'embaucher. La formation et la surveillance du personnel sont nécessaires pour maintenir une production de qualité constante et ce, aussi bien en matière de goût et d'aspect qu'en matière de dimension, de poids et de disponibilité. Les commandes régulières sont les plus faciles à obtenir, mais aussi les plus faciles à perdre si la qualité déçoit. La meilleure équipe commerciale d'une entreprise, c'est une clientèle satisfaite. Le choix du conditionnement dépendra du produit et du marché visés, mais sera un facteur décisif pour la réussite ou l'échec de la commercialisation. Il faudra se conformer à la législation en usage, tant pour offrir un produit sanitairement sûr que pour fournir au consommateur les informations auxquelles il a droit sur la composition et le poids. Une planification soigneuse, basée sur des informations fiables, est essentielle. Si une affaire de transformation agroalimentaire est bien montée, il n'y a pas de raison qu'elle ne marche pas. Il y aura toujours un marché pour les denrées alimentaires qui répondent aux attentes des consommateurs sur le plan de la qualité et de la commodité, à un prix abordable.
Main Author: | |
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Format: | News Item biblioteca |
Language: | French |
Published: |
Technical Centre for Agricultural and Rural Cooperation
1997
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Online Access: | https://hdl.handle.net/10568/61667 |
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