Aval : des recettes alimentaires qui s'échangent

La culture du maïs a été récemment introduite et développée dans les pays du Sahel alors que les techniques de transformation et de préparation ne font pas partie de l'héritage culturel. En revanche, dans les pays voisins qui pratiquent cette culture depuis longtemps, ces recettes n'ont plus de secrets pour les ménagères. Le Projet Action de VALORISATION (AVAL) a mis en place un programme d'échanges Sud Sud de savoir-faire entre trois pays (Bénin, Burkina-Faso, Sénégal) retenus sur la base de besoins exprimés et des connaissances disponibles. A CotonoU au Bénin, une restauratrice révèle à deux artisans alimentaires burkinabé ses secrets culinaires : les subtilités de la fabrication de la pâte de maïs à la vapeur, les tours de main pour réussir une bonne pâte de maïs assaisonnée au jus de poulet. Il lui a fallu une dizaine de jours pour transmettre ainsi tout son savoir sur les multiples façons d'accommoder le maïs. Depuis quatre siècles que ses ancêtres connaissent et pratiquent cette culture introduite par les Portugais, elle est passée 'maître' comme ses congénères dans la préparation de mets à base de maïs. A l'inverse de ses voisines Burkinabé qui ne disposent de maïs que depuis quelques années et ne connaissent que le to (pâte ordinaire) et parfois le couscous. Le projet AVAL* a pour objectif de diversifier les produits alimentaires locaux pour les consommateurs urbains. La stratégie choisie par AVAL est de former des femmes artisans par un échange de savoir-faire entre les pays de la sous région, ce qui favorise l'émergence d'entreprises dans le secteur agroalimentaire. Trois constats sont à l'origine du lancement de ce projet. Tout d'abord, l'Afrique de l'Ouest est confrontée depuis une trentaine d'années à un défi majeur : assurer l'approvisionnement des villes face à l'expansion galopante de leurs populations. Les petites entreprises agroalimentaires en milieu urbain sont une réponse stratégique à ce défi. En deuxième lieu, dans certains pays du Sahel comme le Mali, le Niger ou le Burkina Faso, les agriculteurs, pour réduire les risques de sécheresse et de famine, ont ajouté le maïs et le manioc à leurs cultures traditionnelles afin de diversifier leurs productions. Ces nouveaux produits sont essentiellement destinés à l'alimentation des populations locales. Mais les techniques de transformation et de préparation sont mal connues des femmes. Enfin, les nouveaux styles alimentaires des citadins se caractérisent principalement par la diversification des produits, des plats et des pratiques de consommation. Cette diversité alimentaire peut être obtenue par l'importation de recettes européennes. Favoriser plutôt la diffusion de recettes africaines, appartenant au même environnement écologique et socioéconomique, assure de façon durable la valorisation des ressources locales. Les producteurs, acteurs clés La phase pilote du projet AVAL a duré deux ans jusqu'à fin mars 1996. Au démarrage, le projet a d'abord procédé à l'identification des acteurs professionnels qui seraient les partenaires des échanges, comme transmetteurs ou comme récepteurs. C'est à travers le regard, l'imitation des gestes et les expérimentations répétées que ce transfert se fait de façon efficace et durable. Auparavant, des tests d'acceptabilité des produits concernés sont organisés dans les pays 'demandeurs' afin de sélectionner ceux qui ont quelques chances d'être acceptés et appréciés. Ainsi, dans les échanges Bénin Sénégal, les consommateurs sénégalais ont préféré les produits granulés de maïs de type 'couscous', et rejeté les pâtes trop éloignées des habitudes alimentaires locales. La première opération de transfert 'maïs' s'est effectuée du Bénin vers le Burkina Faso où elle a connu un grand succès. Les cours de cuisine de la restauratrice béninoise à ses collègues burkinabé ont été dispensés avec beaucoup de maîtrise et d'efficacité. A leur retour, les Burkinabé ont immédiatement transmis leurs connaissances à 25 gargotières du pays. La même opération de transfert 'maïs' a été effectuée vers le Sénégal. Le maïs n'est pas la seule culture à laquelle le projet se soit intéressé. Une opération de transfert a aussi été organisée du Bénin vers le Burkina Faso pour des techniques de transformation et de conservation du manioc. En effet, dans ce pays, comme dans d'autres de la zone sahélienne, les tubercules sont simplement bouillis, quand ils ne pourrissent pas après la récolte faute de savoir-faire ou qu'ils ne sont pas jetés en raison de leur toxicité. A quelques centaines de kilomètres de ces zones, au Sud Bénin notamment, les femmes préparent le gari qui se conserve pendant plus d'une année, le tapioca, des beignets et des gâteaux. En outre, les méthodes traditionnelles qu'elles utilisent pour la fabrication de ces aliments permettent la détoxification du manioc. Deux membres d'un groupement de producteurs de gari et de tapioca du Sud Bénin ont contribué en décembre 1995 à la formation des femmes du village de Kpadiari, dans l'est du Burkina Faso. Les équipements nécessaires pour ces transformations (peu onéreux et facilement ó reproductibles) ont été offerts au village par le projet. Le projet a prévu d'échanger les savoir-faire mais aussi d'améliorer ceux qui existent localement, de concevoir et de diffuser des outils d'aide à l'innovation alimentaire. C'est ainsi qu'une unité expérimentale de production d'aklui (bouillie de maïs pour le petit-déjeuner) a été montée au Bénin. Il s'agit maintenant de lever les contraintes techniques pour rentabiliser la production et passer au stade de petite entreprise autonome. De même, un décortiqueur à néré a été mis au point au Sénégal, bien adapté techniquement, mais qui demande encore à trouver sa place sociale et économique. Devant les bons résultats enregistrés au cours de la phase pilote, une extension du projet est envisagée pour les années à venir. Le Mali, le Togo et le Cameroun ont déjà exprimé leur souhait d'être intégrés dans ce programme. Le projet AVAL implique principalement la Faculté des Sciences Agronomiques de l'Université nationale du Bénin, le CIRAD-Sar en France, le Programme de promotion des céréales locales au Sahel (PROCELOS) et le CNRST au Burkina-Faso, l'ENDA GRAF et l'institut de technologie alimentaire au Sénégal. Contact : Mathurin Coffi Nago - FSA/UNB - 01 Boîte Postale 526 - Cotonou - BENIN Télécopie : (229) 30 02 76

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Bibliographic Details
Main Author: Technical Centre for Agricultural and Rural Cooperation
Format: News Item biblioteca
Language:French
Published: Technical Centre for Agricultural and Rural Cooperation 1997
Online Access:https://hdl.handle.net/10568/61429
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