Le rôle de l’Etat : établir une réglementation plus stricte

Le rôle de l’Etat : établir une réglementation plus stricte pour le secteur Introduction suggérée Jusqu’au début des années 80, les gouvernements estimaient généralement de leur devoir et de leur responsabilité de prendre une part active au « financement du développement », en conduisant par exemple de vastes programmes de crédit pour les populations défavorisées, rurales en particulier. Mais devant les échecs répétés de ces programmes, on a assisté à la fermeture des banques publiques de développement et à la libéralisation du secteur de la microfinance. Pourtant l’Etat a toujours un rôle capital à jouer face à la microfinance, un rôle d’assainissement d'un secteur où la réglementation, actuellement, soit n’existe pas soit n’est pas appliquée. Stanislas Dalmeida est Chef de service à la Cellule de surveillance des structures financières décentralisées au Bénin et il nous en dit plus au micro d’Euloge Aidasso. Début de la bande : « Oui, le rôle de l’Etat en matière de microfinance …» Fin de la bande : «…les impayés, ce qui crée la mauvaise gouvernance. » Durée de la bande : 6’32 Annonce de fin : Cette émission vous était proposée par le CTA. Transcription Dalmeida Oui, le rôle de l’Etat en matière de microfinance a surtout été constaté dans les années 90 après la déconfiture des banques - les banques commerciales et la banque de développement- et l’on a éprouvé la nécessité de créer des institutions de microfinance pour pallier un peu à cette insuffisance. C’est ainsi que dans les années 90, l’engouement a pris au niveau national : nous avons vu naître des institutions de microfinance dans toutes les contrées du pays et il s’est avéré nécessaire que l’Etat réglemente cette activité ; pratiquement une nouvelle loi sera bientôt sur la table de nos parlementaires… Aidasso Alors pourquoi une nouvelle loi ? Dalmeida Une nouvelle loi parce que l’ancienne avait des insuffisances. Elle était faite seulement pour les institutions mutualistes de crédit alors qu’au niveau des institutions de microfinance, nous avons des associations, nous avons des ONG, nous avons des sociétés. Aidasso Parlant toujours de la réglementation, est-ce que vous avez pu mesurer le degré de succès et l’efficacité de la réglementation actuelle ? Dalmeida Oui … comme toute loi, il y a des institutions qui n’arrivent pas à la respecter et qui existent en marge de la réglementation. Aidasso Il y a des établissements qui s’installent sans remplir les formalités d’usage ? Dalmeida Bien sûr ! Sans les remplir, sans venir déposer leur dossier d’autorisation ici. Aidasso Alors ils collectent les fonds … Dalmeida Ils collectent l’épargne des contribuables et exercent en marge de la réglementation : c’est ce que nous ne voulons pas. Aidasso Mais comment se fait-il que ces institutions s’installent sans que vous le sachiez ? Il n’y a pas un contrôle en amont ? Dalmeida Non, vous savez, lorsque vous avez votre argent, vous avez un capital, un petit capital, vous installez quelque chose et vous appelez les gens pour dire, : « ah, je fais du crédit ». Lorsque la population entend qu’ils vont octroyer du crédit quelque part, elle est intéressée et vous collectez son épargne. Mais pour le moment, nous ne pouvons pas nous opposer à l’installation mais on demande aux gens de se mettre en règle, de constituer les dossiers pour venir exercer en accord avec la réglementation… Aidasso Vous donnez deux ans. Pourquoi ne pas fermer systématiquement ces institutions, pourquoi donner deux ans pour que les gens se mettent en règle ? Dalmeida Oui, parce vous savez, il y a des gens qui ont pris du crédit chez eux, il y a des gens qui ont déposé de l’épargne, il y a des gens qui ont pris du crédit. En fermant automatiquement, ça crée un problème. Nous avons estimé qu’en deux ans, les crédits seraient déjà venus à leur terme, les gens auraient déjà su que cette institution n’est pas autorisée, ils auraient pris leur épargne … Aidasso Alors ça veut dire que c’est pratiquement la pagaille et que l’Etat n’arrive pas à superviser tout ça ? Dalmeida Non, nous supervisons. En fait nous avons 205 institutions de microfinance autorisées sur près de 700 qui exercent. Vous voyez qu’il y en a 500 qui exercent en marge de la réglementation. Nous envoyons des équipes sur le terrain pour d’abord sensibiliser, faire ce recensement et sensibiliser, c'est ce à quoi nous nous attelons. Aidasso Alors actuellement, dans ce contexte, comment est-ce que vous voyez le rôle de l’Etat ? Quel est le nouveau rôle que l’Etat doit jouer alors? Dalmeida L’Etat est en train, aujourd’hui, avec la création du Ministère de la microfinance et du Fonds national de la microfinance, avec les outils comme le microcrédit aux plus pauvres, avec la surveillance, nous estimons que l’Etat est en train de faire beaucoup actuellement. Il y a deux ans on n’était pas à ce niveau-là. Aujourd’hui on peut mesurer le rôle de l’Etat qui a pris ce secteur comme un secteur vital qui constitue un levier pour le développement de notre pays. Aidasso Il n’y a pas longtemps, il y a eu une rencontre qui a été organisée sur le secteur de la microfinance au Bénin. Qu’est-ce que ça a donné véritablement ? Dalmeida Nous avons analysé les causes profondes des difficultés du secteur, à savoir les impayés, c'est-à-dire là où le problème se pose. Les impayés, qu’est-ce qui cause ces impayés ? Nous avons 24 milliards d’impayés dans le pays, ce qui fait un taux de créance en souffrance de 10%, contrairement à la norme qui est de 5%. Donc vous voyez qu’on a dépassé la norme et les vraies causes c’est le peu de professionnalisme qui caractérise le secteur, surtout les agents de crédit : avant qu’un crédit soit en impayé, certainement on peut voir qu’il est mal monté. Donc nous avons sensibilisé les gens sur les dispositifs à prendre pour un bon crédit et ensuite il y a la gouvernance dans certaines institutions : vous n’êtes pas sans savoir qu’il y a des institutions qui se portent très mal aujourd’hui … Nous avons attiré l’attention sur la mauvaise gouvernance car il fallait que les dirigeants comprennent. Voilà les deux facteurs qui ont fait l’objet de recommandations au cours de ce symposium. Aidasso Est-ce qu'il ne faudrait pas créer des associations professionnelles que l’Etat pourrait superviser et qui pourraient véritablement assainir un peu le milieu ? Dalmeida Non, il y a une association de praticiens, le consortium Alafia qui quand même joue son rôle, vous savez, mais toutes les institutions ne sont pas membres du consortium. C’est ce qui fait que peut être vous avez des brebis galeuses. Aidasso Est-ce que quelque part ce n’est pas aussi la réglementation qui n’est pas incitative et qui ne permet pas aux gens de se conformer, alors ils préfèrent rester dans l’informel ? Dalmeida Non, la réglementation est même plus incitative… Aidasso Comment ? Dalmeida C’est la première fois que l'on exerce sans payer l’impôt … Aidasso Il n’y a pas d’impôts à payer ? Dalmeida Il n’y a pas d’impôts à payer ! C’est seulement peut-être les pièces … Lorsqu’on parle de casier judiciaire des dirigeants, lorsqu’on parle de plan d’affaires, lorsqu’on parle de manuel de procédures comptable et financière, je parlais de la professionnalisation …les gens n’arrivent pas à faire ce manuel-là et s’adressent peut-être à des cabinets qui leur reviennent un peu cher. C’est pourquoi nous avons souhaité que la Direction générale de la promotion de la microfinance qui a été créée puisse accompagner ces IMF qui n’ont pas les moyens de s’adresser à un cabinet et les aider petit à petit à se mettre en règle. Mais ce que nous, nous faisons, nous faisons des missions de conseil et d’appui, nous relevons les lacunes, nous faisons des constats et nous disons ce qu’il faut faire. Aidasso Et à grands traits, les lacunes se résument à quoi ? Dalmeida Oui, en fait les lacunes c’est la gouvernance, les institutions, les conseils d’administration qui ne se réunissent pas, les contrôles internes qui ne se font pas, les dossiers de crédit qui sont mal montés, ou qui sont montés avec un peu de favoritisme …Et voilà un peu ce qui crée les impayés, ce qui crée la mauvaise gouvernance. Fin de la bande

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Bibliographic Details
Main Author: Technical Centre for Agricultural and Rural Cooperation
Format: Audio biblioteca
Language:French
Published: Technical Centre for Agricultural and Rural Cooperation 2008
Online Access:https://hdl.handle.net/10568/59552
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