Pour arrêter la mer de sable, empêcher les dunes de naître

Dans tous les pays du Sahel, l'avancée des sables est devenue un souci majeur des responsables de l'agriculture et de l'environnement. Les dunes menacent toutes les infrastructures importantes des pays. Pour tenter d'enrayer ce fléau, les populations et les gouvernements ont mis en oeuvre une série d'actions mécaniques, chimiques et biologiques. La lutte contre l'avancée des dunes n'est pas chose nouvelle. Depuis l'Antiquité, l'homme connaît ce fléau, le sable, qui menace jour après jour, sans rémission, les champs, les oasis, les pistes et les routes, les jardins de case. Aujourd'hui, sous l'effet conjugué de la sécheresse et de la surexploitation des terroirs par l'homme et les animaux, les sables avancent plus que jamais car ils ne sont plus retenus par la végétation. Le fleuve Sénégal est menacé, la longue route de l'Espoir en Mauritanie, toutes les oasis sahariennes, les niayes au Sénégal, les mares au Niger, aucun pays de la zone tropicale n'échappe à ce phénomène. Stopper les dunes à la main... Actuellement, plusieurs méthodes permettent de stopper les sables dans leur progression. La plus primitive et la plus sommaire consiste tout simplement à enlever mécaniquement ou manuellement le sable avec une pelle, même un seau ou une cuvette. Parfois, des méthodes traditionnelles sont encore utilisées, comme de pelleter les deux extrémités d'une barkhane (dune en croissant). Son fragile équilibre rompu, la dune s'effondre. Certains construisent une dune artificielle qui retient le sable, laissant un peu plus loin le champ ou le jardin découvert. D'autres, à l'instar des Egyptiens de l'Antiquité, répandent des produits pétroliers qui collent les sables. L'industrie chimique tente d'améliorer cette pratique polluante et nauséabonde en mettant au point des molécules qui, mélangées à de l'eau et projetées en jet fin, créent un réseau de petites fibres qui retiennent le sable au sol. C'est une solution prometteuse mais encore beaucoup trop chère à mettre en oeuvre à grande échelle. Dresser des palissades ou planter des arbres Autre méthode traditionnelle de stopper l'avancée des dunes : dresser un obstacle. Le plus fréquemment, les populations tressent des haies de branchages, des fascines, pour retenir le sable. Tiges de mil, brins d'alfa, feuilles de dattiers ou de palmiers à huile, le matériel végétal disponible localement est utilisé. Là encore, l'industrie moderne tente de prendre le relais de ces méthodes artisanales surtout dans les régions où la végétation est pauvre. Mais les tissus en matière plastique et les pseudo textiles qui sont sur le marché coûtent encore trop cher. Planter des arbres, reste à l'heure actuelle la méthode privilégiée. Prosopis, filao, balanitès et acacias s'alignent en rangs serrés le long des zones à protéger. «Planter des arbres sur les dunes avec une pluviométrie inférieure à 200 ou 100 mm n'est pas une gageure poreuse, la dune nue est une éponge, elle absorbe l'eau de pluie qui ne ruisselle pas mais s'infiltre» explique René Marceau Rochette, consultant au CILSS (Comité Inter- Etats de Lutte contre la Sécheresse au Sahel). Dans tout le Sahel, les paysans savent désormais planter des arbres pour fixer les dunes. Ils le font d'autant plus volontiers que c'est pour eux une nouvelle source d'approvisionnement en bois, fruits, fourrage, plantes médicinales. Mais aujourd'hui, les experts s'inquiètent de la pérennité de cette méthode. Depuis deux ans déjà, les plus anciennes plantations ont fortement ralenti leur croissance. Les sables auraient-ils épuisé leurs stocks d'éléments nutritifs en nourrissant une végétation trop abondante ? Ou bien les dunes sont-elles à sec du fait des plantations et d'une succession d'années sèches ? Sans réponse pour le moment, les agronomes recommandent la prudence. Cesser de produire du sable Les chercheurs du C 11.1' (Centre Technique Forestier Tropical), devant la fragilité de telles méthodes, veulent remonter à la racine du mal. «Les populations s'épuisent à essayer d'arrêter un sable qui n'en finit jamais d'arriver. Les protections qu'ils ont mises en place en aval ne sont qu'un pis aller puisque la source en amont des sables n'est pas tarie» regrette Michel Malagnoux du CTFT : «Il faut désormais démontrer la possibilité de protéger efficacement et de façon durable les infrastructures des pays grâce à une gestion rationnelle du terroir agricole ou pastoral en amont». Protéger la végétation existante sur toute la région, entreprendre des actions de reboisement, limiter le parcours de troupeaux et veiller à ce qu'ils ne détruisent pas tout sur leur passage, légiférer sur la pratique des feux de brousse, ce sont à terme les meilleures méthodes pour empêcher les dunes de se créer et donc d'avancer. Pour de plus amples informations Michel Malagnoux - Centre Technique Forestier Tropical 45bis, avenue de la Belle Gabrielle 94130 - Nogent-sur Marne

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Bibliographic Details
Main Author: Technical Centre for Agricultural and Rural Cooperation
Format: News Item biblioteca
Language:French
Published: Technical Centre for Agricultural and Rural Cooperation 1989
Online Access:https://hdl.handle.net/10568/59201
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