LE SERVICE QUESTIONS -REPONSES DU CTA

Un entretien avec M. Thiendou NIANG, responsable de la documentation. Le CTA a pour vocation de diffuser l'information et il s'acquitte de cette tâche depuis sa création par des moyens très diversifiés. Dans le N07 de SPORE, M. Delleré, chef de la Division technique, avait présenté l'ensemble des actions du CTA dans ce domaine. Ici, M. Niang, responsable de la documentation, décrit l'un des aspects particuliers de ce travail, le service questions-réponses Thiendou NIANG : le CTA est, par définition, un service questions-réponses à la disposition des Etats ACP. Comme vous le savez, la troisième convention de Lomé ACPCEE, stipule en son article 37 que le CTA doit assurer à la demande des Etats ACP, la diffusion de l'information agricole. En créant ce service de renseignements, le CTA entend répondre aux demandes spécifiques émanant de ces pays. Les séminaires et publications sont d'excellents moyens de diffusion d'information mais ils doivent être complétés par une activité qui permet de satisfaire les besoins de groupes cibles très divers. SPORE : créer un SQR, n'est-ce pas avouer en quelque sorte que les centres d'information traditionnels sont impuissants pour répondre à la « vraie » demande du terrain ? Thiendou NIANG : je préfère parler des difficultés que connaissent ces centres qui manquent souvent de moyens : budget insuffisant, personnel limité... Aussi faut-il dire que ces services n'ont pu bénéficier, lors de leur création, d'études ou d'évaluations adéquates des besoins à satisfaire. SPORE : le SQR du CTA est en pleine expansion. Quelles sont les raisons de ce succès, là où tant d'autres ont échoué ? Thiendou NIANG : certes, la demande croît de manière exponentielle. Le CTA a reçu en 1986, 1086 requêtes dont 761 demandes de publication et 325 questions spécifiques et 3664 demandes de publications et 1962 questions spécifiques en 1987, soit cinq fois plus. Le succès du CTA réside principalement dans sa capacité de mobiliser les sources d'information. Un autre motif de satisfaction est le fait que les usagers du SQR font la publicité du CTA, ce qui laisse supposer que les services rendus sont appréciés. SPORE: de quels moyens dispose le CTA pour répondre ? Thiendou NIANG : d'abord, le CTA dispose d'une équipe de conseillers compétents dans le domaine de la recherche, de la technologie, de la formation, de la vulgarisation agricole et de la documentation. Il s'est aussi constitué progressivement un réseau d'experts extérieurs auxquels il fait appel en fonction de leurs spécialisations. En outre, le CTA a rassemblé une bibliothèque de référence, il dispose de sa propre collection de publications et gère un fichier des principales sources d'information. Sur le plan technique, le CTA est connecté aux principales bases de données agricoles : AGRIS (FAO), AGRICOLA (USA) CABI (Royaume-Uni), IBISCUS (France), TROPAG (KIT, Pays-Bas) et « agronomie tropicale » (CIRAD, France) via les serveurs DIMDI et ESA. Ceci grâce au budget substantiel que la direction du Centre a alloué au SQR : 150 000 Ecus en 1987 et 225 000 écus en 1988. SPORE : quels sont vos utilisateurs ? Quelle est la nature des questions ? Thiendou NIANG : l'analyse de la demande met en évidence la grande diversité des utilisateurs du SQR. Les demandes émanent de catégories socioprofessionnelles aussi diverses que chercheurs, vulgarisateurs, formateurs, exploitants agricoles, documentalistes, planificateurs et décideurs. Leurs domaines d'intérêt concernent essentiellement la production végétale et animale, l'agrosylviculture, l'économie et la sociologie rurale, l'enseignement et l'équipement agricole. Mais les questions posées portent sur les plantes légumières (igname, manioc, oseille africaine), oléagineuses (palmier à huile, karité), fruitières (papaye, fraisier, melon) et les céréales (maïs et blé). Bien que le SQR soit à la disposition des 66 Etats ACP et des ressortissants des 12 Etats de la CEE travaillant sur les problèmes de développement, certains pays l'utilisent plus que d'autres: le Bénin, la Côte d'Ivoire, le Ghana, le Kenya, le Nigéria, le Sénégal et le Soudan sont les principaux clients. C'est là probablement l'effet du bouche à oreille. Les demandes d'information ont pour but de résoudre un problème pratique, d'aider une opération de recherche ou de mieux formuler un projet de développement. Il arrive également que la documentation fournie soit utilisée pour élargir ou approfondir des connaissances et, dans ce cas, elle doit être considérée comme un outil de formation continue. SPORE : sous quelle forme fournissez-vous des réponses ? Thiendou NIANG : on peut considérer que dans le cadre du SQR, le CTA fournit quatre types de services. Tout d'abord un service relais qui analyse la demande et l'oriente vers la source d'information la plus pertinente. Cette structure procède aussi à l'évaluation des services rendus. Il offre un service bibliographique en fournissant, à l'aide de la documentation propre au centre et des ressources des bases de données, les références de documents écrits sur un sujet ou un auteur. L'accès aux documents primaires est un troisième type de service rendu, il fournit des copies d'articles et de documents originaux grâce au concours de la British Library Document Supply (Royaume-Uni), du Bureau pour le Développement de la Production Agricole (France), du CABI (Royaume-Uni), du Centre National de la Recherche Scientifique (France) et du PUDOC (Pays-Bas). Enfin, l'équipe des conseillers techniques du CTA et le réseau d'experts extérieurs permet un service conseil qui fournit des avis techniques sur certains aspects spécifiques. SPORE : qui peut vous interroger ? A quel prix ? Quels délais ? Thiendou NIANG : le CTA fournit aux ACP un service d'information gratuit. Mais je précise que chaque réponse coûte au CTA entre 37 et 185 dollars. Quant au délai, il dépend du niveau de complexité de la question et peut varier d'une à six semaines. SPORE : vous rencontrez sûrement des problèmes en répondant à certaines questions ? Thiendou NIANG : c'est vrai. Le succès du SQR ne doit pas cacher les problèmes rencontrés. Le problème majeur est celui de la formulation de la demande. Dans certains cas nous n'avons pas d'informations précises sur le demandeur (niveau de formation ou expérience, profession, langue de travail...) ni sur le projet à mettre en oeuvre. Vous savez, pour répondre de façon adéquate à une question, il importe aussi de connaître la documentation déjà exploitée, la région concernée par le projet, de même que les délais de réponse souhaités. SPORE : ce contact direct avec la demande de terrain influence-t-il le reste des activités du CTA ? Thiendou NIANG : Bien entendu. Le SQR est un des baromètres des besoins d'information ACP. L'analyse des demandes permet d'orienter le CTA dans la réalisation de son programme. C'est ainsi par exemple qu'en 1987 nous avons reçu plusieurs demandes sur des sujets aussi variés que l'exhaure de l'eau, le jojoba, l'escargot et l'héliciculture, la reproduction des petits ruminants, l'animation des groupements villageois. La division technique en tient compte pour la préparation des dossiers destinés aux articles de fond publiés par SPORE, à ses propres publications et à l'identification des sujets de réunions techniques. Le SQR peut aussi exercer son action sur les orientations de recherche. Je peux vous citer le cas d'une institution de recherche de Trinidad qui, ayant observé la présence d'insectes nuisibles du nom de Scatella dans une serre de laitues, a pris contact avec le CTA. Le SQR n'a trouvé que très peu de références à ce sujet, aussi cette institution at-elle défini une opération de recherche assez originale. SPORE : déployer tant d'énergie et de moyens pour répondre à une seule personne, est-ce vraiment économique alors que, certainement, d'autres personnes se posent, sans vous le demander, la même question ? Avez-vous envisagé de diffuser plus largement les réponses? Thiendou NIANG : naturellement. Dans le courant de l'année 1987, par exemple, le CTA a reçu de nombreuses questions sur la culture en allées. Constatant l'intérêt que suscite ce système agroforestier, j'ai publié un article dans Le Courrier (no103, mai-juin 1987) pour orienter les intéressés vers les sources d'information et amorcer un dialogue entre chercheurs et praticiens du développement agricole. Il arrive fréquemment qu'une même question provienne d'utilisateurs d'origines diverses. Par exemple, nous avons reçu d'une ONG du Mali, d'une institution publique du Sénégal et d'un expert de la République fédérale d'Allemagne une question relative à la transformation de la mangue. Comme nous mémorisons tous les éléments de réponse, nous n'avons pas eu à recommencer des recherches. Les coûts de prestation ont été répartis sur ces trois demandes pour une meilleure valorisation du SQR. SPORE: créer un SQR peut être jouer à l'apprenti sorcier. N'avezvous pas peur d'être dépassés un jour et de ne plus pouvoir faire face ? Thiendou NIANG : je ne souhaite pas que le CTA soit un jour submergé de demandes. C'est pourquoi nous travaillons au renforcement des services d'information ACP, de même qu'à la formation à l'utilisation de la documentation. Dans ce contexte, le CTA organise annuellement un cours sur les « sources d'information agricole » dont l'objectif est d'apprendre aux documentalistes « où et comment trouver l'information ? » améliorant ainsi les services que les utilisateurs sont en droit d'attendre. Le CTA prépare actuellement, avec le concours du CABI et du CIRAD, un répertoire des Services d'information agricole dans les pays ACP qui fait suite au répertoire des sources d'information européenne sur l'agriculture tropicale. Il vise à orienter les utilisateurs et à promouvoir les échanges d'information entre pays ACP. Voyez-vous, le CTA joue un rôle de relais mais pas de relais obligé. Notre but est de mettre en relation les sources d'information et les utilisateurs. L'action du SQR s'inscrit dans la politique générale du centre qui est d'être un catalyseur ou, mieux encore, une enzyme puisque son rôle est de provoquer et d'accélérer une réaction. Vous savez au CTA nous nous voulons des courtiers honnêtes. Nous sommes ambitieux mais nous voulons rester humbles.

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Bibliographic Details
Main Author: Technical Centre for Agricultural and Rural Cooperation
Format: News Item biblioteca
Language:French
Published: Technical Centre for Agricultural and Rural Cooperation 1988
Online Access:https://hdl.handle.net/10568/58848
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