Pisciculture : les agriculteurs se jettent à l'eau

Les systèmes agricoles actuels ne permettront pas de satisfaire les besoins alimentaires de la plupart des pays ACP dans les décennies à venir. Là où il y a suffisamment d'eau et où la capacité de rétention d'eau des sols est satisfaisante, l'intégration de l'aquaculture à l'agriculture pourrait constituer l'amorce d'une solution. La plupart des pratiques agricoles entraînent une dégradation de l'environnement et, poussés par la pauvreté, un nombre croissant d'agriculteurs adoptent des systèmes de culture et d'élevage non viables à long terme. La culture sur brûlis, parfaitement adaptée lorsque les populations étaient beaucoup plus réduites, contribue aujourd'hui à la déforestation et à l'érosion des sols. Selon des estimations, l'agriculture aurait provoqué la 'désertification' de 142 millions d'hectares de terres de culture sèche en Afrique australe et dans la zone soudano sahélienne ; dans ces mêmes régions, 5 millions d'hectares de terres irriguées connaîtraient un phénomène de salinisation. Dans plusieurs Etats des Caraïbes et du Pacifique, on assiste également à un appauvrissement semblable de zones forestières et agricoles autrefois productives. Les populations rurales ont conscience des conséquences de leurs activités mais la pauvreté ne leur laisse guère d'alternative. Depuis de nombreuses années, on reconnaît la nécessité de trouver de nouveaux systèmes agricoles durables mais les avis divergent quant à leur application. Une des principales raisons est que l'on n'a pas adopté une recherche pluridisciplinaire. Par exemple, une manière d'intensifier la production tout en régénérant l'environnement est d'intégrer l'aquaculture dans l'agriculture. Le mariage de la terre et de l'eau L'aquaculture permet d'utiliser les déchets agricoles pour rendre plus productives des terres de faible rendement, à condition que les sols aient une bonne capacité de rétention en eau. Les poissons transforment les déchets végétaux et animaux en protéines de grande qualité et, dans le même temps, enrichissent la vase du bassin qui peut servir d'engrais dans les champs. Ce système durable et cyclique, où la culture, l'élevage et la pisciculture se renforcent mutuellement, est présenté schématiquement dans la figure 1. La valeur de ce système intégré, qui permet d'intensifier l'agriculture et de régénérer l'environnement par diversification et recyclage, a été démontrée dans le cadre de recherches menées au Malawi par des chercheurs du Centre international de gestion des ressources aquatiques vivantes (ICLARM), basé aux Philippines. Ainsi, dans le district de Zomba, les agriculteurs classent les terres en six catégories, qui vont des sols montagneux aux plaines fluviales. Le chercheur, spécialiste de l'analyse des systèmes agro écologiques, procède à une section transversale des différents types de terrains et répertorie toutes les exploitations, ainsi que les caractéristiques des sols et des ressources hydriques (fig. 2). Il existe de nombreuses différences entre les plaines alluviales, où le niveau de la nappe phréatique est élevé, les sols sableux, où la nappe est plus basse, et les terrains en pente. De plus, les terres situées sur les plaines alluviales se répartissent en terres cultivées et en terres non cultivées. Les activités d'élevage et de cultures sont réparties en fonction de cette division (fig. 2). Les bassins piscicoles sont construits sur des terres marécageuses et dans des zones habitées, lorsque la présence d'un cours d'eau ou d'une source le permet. L'examen de la section transversale du système agro écologique révèle de nombreuses possibilités d'intégrer agriculture et pisciculture. La vase des bassins peut enrichir les lopins de maraîchage, l'eau peut être utilisée pour les irriguer et pour abreuver le bétail. Les déjections animales, ainsi que les résidus de culture, les adventices, les litières de feuilles, les fruits et légumes pourris peuvent servir à enrichir les bassins et les sols. Les autres sous produits agricoles, tels que le son de maïs ou de riz, peuvent également être utilisés pour l'alimentation des poissons. Les systèmes d'aquaculture intégrés dépendent de nombreuses variables et sont donc étroitement liés aux caractéristiques locales. La plupart d'entre eux reposent sur des bassins simples où l'eau se renouvelle peu, voire pas du tout. Cela permet l'accumulation des éléments nutritifs qui contribuent à la croissance d'aliments naturels, particulièrement si l'on y ajoute des engrais, du fumier ou d'autres déchets. La densité de peuplement d'un bassin piscicole dépend, pour une large part, de la disponibilité de nourriture. Les systèmes aquaculture agriculture sont donc très souples et constituent une solution idéale pour l'utilisation des différentes matières premières existant dans les zones rurales. L'expérience africaine Contrairement à ce qui se passe dans la plupart des pays asiatiques, l'aquaculture est une pratique très récente en Afrique, et le manque d'expérience et de formation a été la cause de nombreuses déceptions. Cependant, dans un certain nombre de pays africains, les agriculteurs ont acquis de réelles compétences en la matière et les spécialistes jugent favorablement les progrès accomplis et les potentialités. D'après André Coche, qui a passé en Afrique 17 de ses 26 années au service de la FAO, et qui est une autorité incontestée en aquaculture, si le système le plus répandu est celui fondé sur l'utilisation des ressources naturelles, les systèmes intégrés sont préférés par les agriculteurs, qui sont devenus le moteur du développement de l'aquaculture dans des pays comme le Malawi, la Zambie et le Zimbabwe. Et André Coche souligne le potentiel énorme qu'offre l'association culture pêcheries pour l'intensification de l'emploi des ressources locales et la régénération de l'environnement. Selon lui, le potentiel général de développement est excellent au Malawi, en Tanzanie, en Zambie et au Zimbabwe et il est relativement bon au Lesotho et au Swaziland, tandis que l'Angola et le Mozambique présentent de réelles potentialités. Au Nigéria, de nombreux éleveurs de poissons opèrent une diversification en intégrant des activités agricoles, ce qui leur permet d'accroître leurs revenus. Le bétail, la volaille et les cultures sont intégrés avec succès, la combinaison préférée étant celle qui associe cultures bétail poissons. Lorsque le système utilise les animaux de basse cour ou les porcs, des cages peuvent être construites au dessus des bassins, ou, dans le cas de bovins et de porcs, les déjections sont rejetées dans le bassin. Dans les régions rizicoles, le riz permet l'installation de frayères, un système très répandu et utilisé depuis longtemps en Asie. Dans les zones de culture sèche, on plante du maïs, des arachides et du soja pour nourrir les poissons. Moins de carences en protéines Dans la province de Lapuala, au nord est de' la Zambie, le ministère des pêcheries zambien et le programme ALCOM (Aquaculture for Local Community Développement : aquaculture pour le développement des communautés villageoises) encouragent la création d'élevages artisanaux. ALCOM, basé au Zimbabwe, est un programme d'envergure régionale qui con cerne tous les pays membres du Comite pour le développement de l'Afrique australe. Son objectif est de contribuer à l'expansion de l'aquaculture artisanale, par la diffusion, l'amélioration et l'expérimentation de différentes méthodes. L'Université du Sussex et l'Institut d'Aquaculture de l'Université de Stirling participent aux recherches visant à mettre au point des techniques adaptées. Par le passé, l'agriculture dans la région de Luapula reposait sur le 'citemene', un type de culture sur brûlis. Cependant, sous l'effet conjugué de l'adoption de mesures d'interdiction par les pouvoirs publics et d'une pression démographique de plus en plus forte, on assiste à une sédentarisation de l'agriculture. La nourriture de base des populations rurales est le manioc, auquel s'ajoutent le mil, le maïs, les arachides et quelques légumes. Dans certaines zones de la province, le taux de carence en protéines, notamment chez les jeunes enfants, est parmi les plus élevés du pays. La pénurie de protéines animales, le fait que le poisson est l'un des aliments préférés des habitants et l'abondance des eaux de surface constituent un potentiel fort prometteur pour le développement de l'aquaculture. Les dernières années ont été marquées par une diffusion rapide de l'aquaculture parmi les petits agriculteurs et, dans certains villages, presque toutes les familles possèdent au moins un étang. On estime que les meilleurs rendements se situent autour de 500 kg/ha/ an, mais la plupart des éleveurs ont une production beaucoup plus faible. Cependant, en dépit de cette productivité qui peut paraître peu élevée, de nombreux pisciculteurs se déclarent satisfaits de leur élevage. Certains agriculteurs comprennent rapidement les avantages qu'offre l'intégration de la pisciculture dans leurs activités agricoles, alors que d'autres redoutent de ne pouvoir assumer la charge de travail supplémentaire, les investissements et la complexité de la gestion. D'après des études menées par l'ALCOM en Zambie, les agriculteurs qui n'ont guère d'autres possibilités d'occuper leur temps, leurs terres et leur eau sont ceux qui adoptent le plus volontiers ce système et qui obtiennent les meilleurs rendements. Cela est très avantageux car plus la famille de l'agriculteur est pauvre, plus les revenus supplémentaires tirés de la production piscicole ont de chances de garantir un accroissement à long terme de la productivité générale. A l'inverse, si l'agriculteur est déjà très occupé et tire des revenus satisfaisants des terres et de l'eau dont il dispose, l'élevage de poissons ne présente guère d'intérêt pour lui. Certains agriculteurs aisés, toutefois, auront l'imagination, les ressources financières et l'énergie nécessaires pour poursuivre l'expansion de leur entreprise agricole en intégrant l'aquaculture à leurs activités de culture et/ou d'élevage. Rien ne permet encore de déterminer de façon précise le rôle joué parles pisciculteurs dans les communautés où l'aquaculture est destinée à assurer la subsistance. On peut envisager la spécialisation de certains dans la production d'alevins pour des tiers, au bénéfice de tous, mais il y a un risque que quelques pisciculteurs 'd'élite' s'approprient les principaux moyens de production et en viennent à dominer la production au détriment des autres. Ce risque est toutefois minime lorsque la pisciculture est intégrée car, dans ce cas, les facteurs de production externes sont très réduits. Quel avenir? Dans de nombreux pays ACP, les pratiques actuelles d'utilisation des terres et de l'eau ne permettent pas de satisfaire les besoins alimentaires et financiers des populations et sont préjudiciables à l'environnement. Une intensification de la production alimentaire s'impose mais sans son corollaire habituel, la dégradation de l'environnement. Le défi consiste donc à trouver un système qui concilie ces deux impératifs et qui soit à la portée, en termes de gestion et de ressources financières, des populations rurales démunies. L'intégration de la pisciculture à l'agriculture semble être une solution appropriée, à la fois respectueuse de l'environnement et intéressante pour les agriculteurs. Cependant, elle constitue un système de production nouveau dont certains aspects échappent totalement à la grande majorité des populations rurales des pays ACP. Son succès dépendra pour une large part de l'aide accordée par les pouvoirs publics pour la formation, la fourniture d'alevins au départ, le conseil en matière de gestion pendant la période d'apprentissage des agriculteurs et les encouragements aux plus démunis pour qui le système présente le plus d'intérêt. Les efforts que consentiront les pouvoirs publics dépendront de plusieurs facteurs, notamment des prévisions concernant la contribution de ce système à la croissance économique, sous forme d'accroissement de la consommation de poisson. Il faut toutefois prendre en compte un autre facteur économique, l'effet synergique sur la production alimentaire de l'intégration de la pisciculture à l'agriculture et ses conséquences bénéfiques pour l'environnement réduction, voire inversion, des phénomènes de dégradation. Pour en savoir plus * ICLARM MC P.O. Box 1501 Makati Metro Manila 1299 PHILIPPINES * IEMVT/CIRAD c/o CEMAGREF Domaine de Lavalette BP 5095 34033 Montpellier cedex 1 FRANCE * FAO Via delle Terme de Caracalla 00100 Rome – Italie

Saved in:
Bibliographic Details
Main Author: Technical Centre for Agricultural and Rural Cooperation
Format: News Item biblioteca
Language:French
Published: Technical Centre for Agricultural and Rural Cooperation 1992
Online Access:https://hdl.handle.net/10568/60077
Tags: Add Tag
No Tags, Be the first to tag this record!
Description
Summary:Les systèmes agricoles actuels ne permettront pas de satisfaire les besoins alimentaires de la plupart des pays ACP dans les décennies à venir. Là où il y a suffisamment d'eau et où la capacité de rétention d'eau des sols est satisfaisante, l'intégration de l'aquaculture à l'agriculture pourrait constituer l'amorce d'une solution. La plupart des pratiques agricoles entraînent une dégradation de l'environnement et, poussés par la pauvreté, un nombre croissant d'agriculteurs adoptent des systèmes de culture et d'élevage non viables à long terme. La culture sur brûlis, parfaitement adaptée lorsque les populations étaient beaucoup plus réduites, contribue aujourd'hui à la déforestation et à l'érosion des sols. Selon des estimations, l'agriculture aurait provoqué la 'désertification' de 142 millions d'hectares de terres de culture sèche en Afrique australe et dans la zone soudano sahélienne ; dans ces mêmes régions, 5 millions d'hectares de terres irriguées connaîtraient un phénomène de salinisation. Dans plusieurs Etats des Caraïbes et du Pacifique, on assiste également à un appauvrissement semblable de zones forestières et agricoles autrefois productives. Les populations rurales ont conscience des conséquences de leurs activités mais la pauvreté ne leur laisse guère d'alternative. Depuis de nombreuses années, on reconnaît la nécessité de trouver de nouveaux systèmes agricoles durables mais les avis divergent quant à leur application. Une des principales raisons est que l'on n'a pas adopté une recherche pluridisciplinaire. Par exemple, une manière d'intensifier la production tout en régénérant l'environnement est d'intégrer l'aquaculture dans l'agriculture. Le mariage de la terre et de l'eau L'aquaculture permet d'utiliser les déchets agricoles pour rendre plus productives des terres de faible rendement, à condition que les sols aient une bonne capacité de rétention en eau. Les poissons transforment les déchets végétaux et animaux en protéines de grande qualité et, dans le même temps, enrichissent la vase du bassin qui peut servir d'engrais dans les champs. Ce système durable et cyclique, où la culture, l'élevage et la pisciculture se renforcent mutuellement, est présenté schématiquement dans la figure 1. La valeur de ce système intégré, qui permet d'intensifier l'agriculture et de régénérer l'environnement par diversification et recyclage, a été démontrée dans le cadre de recherches menées au Malawi par des chercheurs du Centre international de gestion des ressources aquatiques vivantes (ICLARM), basé aux Philippines. Ainsi, dans le district de Zomba, les agriculteurs classent les terres en six catégories, qui vont des sols montagneux aux plaines fluviales. Le chercheur, spécialiste de l'analyse des systèmes agro écologiques, procède à une section transversale des différents types de terrains et répertorie toutes les exploitations, ainsi que les caractéristiques des sols et des ressources hydriques (fig. 2). Il existe de nombreuses différences entre les plaines alluviales, où le niveau de la nappe phréatique est élevé, les sols sableux, où la nappe est plus basse, et les terrains en pente. De plus, les terres situées sur les plaines alluviales se répartissent en terres cultivées et en terres non cultivées. Les activités d'élevage et de cultures sont réparties en fonction de cette division (fig. 2). Les bassins piscicoles sont construits sur des terres marécageuses et dans des zones habitées, lorsque la présence d'un cours d'eau ou d'une source le permet. L'examen de la section transversale du système agro écologique révèle de nombreuses possibilités d'intégrer agriculture et pisciculture. La vase des bassins peut enrichir les lopins de maraîchage, l'eau peut être utilisée pour les irriguer et pour abreuver le bétail. Les déjections animales, ainsi que les résidus de culture, les adventices, les litières de feuilles, les fruits et légumes pourris peuvent servir à enrichir les bassins et les sols. Les autres sous produits agricoles, tels que le son de maïs ou de riz, peuvent également être utilisés pour l'alimentation des poissons. Les systèmes d'aquaculture intégrés dépendent de nombreuses variables et sont donc étroitement liés aux caractéristiques locales. La plupart d'entre eux reposent sur des bassins simples où l'eau se renouvelle peu, voire pas du tout. Cela permet l'accumulation des éléments nutritifs qui contribuent à la croissance d'aliments naturels, particulièrement si l'on y ajoute des engrais, du fumier ou d'autres déchets. La densité de peuplement d'un bassin piscicole dépend, pour une large part, de la disponibilité de nourriture. Les systèmes aquaculture agriculture sont donc très souples et constituent une solution idéale pour l'utilisation des différentes matières premières existant dans les zones rurales. L'expérience africaine Contrairement à ce qui se passe dans la plupart des pays asiatiques, l'aquaculture est une pratique très récente en Afrique, et le manque d'expérience et de formation a été la cause de nombreuses déceptions. Cependant, dans un certain nombre de pays africains, les agriculteurs ont acquis de réelles compétences en la matière et les spécialistes jugent favorablement les progrès accomplis et les potentialités. D'après André Coche, qui a passé en Afrique 17 de ses 26 années au service de la FAO, et qui est une autorité incontestée en aquaculture, si le système le plus répandu est celui fondé sur l'utilisation des ressources naturelles, les systèmes intégrés sont préférés par les agriculteurs, qui sont devenus le moteur du développement de l'aquaculture dans des pays comme le Malawi, la Zambie et le Zimbabwe. Et André Coche souligne le potentiel énorme qu'offre l'association culture pêcheries pour l'intensification de l'emploi des ressources locales et la régénération de l'environnement. Selon lui, le potentiel général de développement est excellent au Malawi, en Tanzanie, en Zambie et au Zimbabwe et il est relativement bon au Lesotho et au Swaziland, tandis que l'Angola et le Mozambique présentent de réelles potentialités. Au Nigéria, de nombreux éleveurs de poissons opèrent une diversification en intégrant des activités agricoles, ce qui leur permet d'accroître leurs revenus. Le bétail, la volaille et les cultures sont intégrés avec succès, la combinaison préférée étant celle qui associe cultures bétail poissons. Lorsque le système utilise les animaux de basse cour ou les porcs, des cages peuvent être construites au dessus des bassins, ou, dans le cas de bovins et de porcs, les déjections sont rejetées dans le bassin. Dans les régions rizicoles, le riz permet l'installation de frayères, un système très répandu et utilisé depuis longtemps en Asie. Dans les zones de culture sèche, on plante du maïs, des arachides et du soja pour nourrir les poissons. Moins de carences en protéines Dans la province de Lapuala, au nord est de' la Zambie, le ministère des pêcheries zambien et le programme ALCOM (Aquaculture for Local Community Développement : aquaculture pour le développement des communautés villageoises) encouragent la création d'élevages artisanaux. ALCOM, basé au Zimbabwe, est un programme d'envergure régionale qui con cerne tous les pays membres du Comite pour le développement de l'Afrique australe. Son objectif est de contribuer à l'expansion de l'aquaculture artisanale, par la diffusion, l'amélioration et l'expérimentation de différentes méthodes. L'Université du Sussex et l'Institut d'Aquaculture de l'Université de Stirling participent aux recherches visant à mettre au point des techniques adaptées. Par le passé, l'agriculture dans la région de Luapula reposait sur le 'citemene', un type de culture sur brûlis. Cependant, sous l'effet conjugué de l'adoption de mesures d'interdiction par les pouvoirs publics et d'une pression démographique de plus en plus forte, on assiste à une sédentarisation de l'agriculture. La nourriture de base des populations rurales est le manioc, auquel s'ajoutent le mil, le maïs, les arachides et quelques légumes. Dans certaines zones de la province, le taux de carence en protéines, notamment chez les jeunes enfants, est parmi les plus élevés du pays. La pénurie de protéines animales, le fait que le poisson est l'un des aliments préférés des habitants et l'abondance des eaux de surface constituent un potentiel fort prometteur pour le développement de l'aquaculture. Les dernières années ont été marquées par une diffusion rapide de l'aquaculture parmi les petits agriculteurs et, dans certains villages, presque toutes les familles possèdent au moins un étang. On estime que les meilleurs rendements se situent autour de 500 kg/ha/ an, mais la plupart des éleveurs ont une production beaucoup plus faible. Cependant, en dépit de cette productivité qui peut paraître peu élevée, de nombreux pisciculteurs se déclarent satisfaits de leur élevage. Certains agriculteurs comprennent rapidement les avantages qu'offre l'intégration de la pisciculture dans leurs activités agricoles, alors que d'autres redoutent de ne pouvoir assumer la charge de travail supplémentaire, les investissements et la complexité de la gestion. D'après des études menées par l'ALCOM en Zambie, les agriculteurs qui n'ont guère d'autres possibilités d'occuper leur temps, leurs terres et leur eau sont ceux qui adoptent le plus volontiers ce système et qui obtiennent les meilleurs rendements. Cela est très avantageux car plus la famille de l'agriculteur est pauvre, plus les revenus supplémentaires tirés de la production piscicole ont de chances de garantir un accroissement à long terme de la productivité générale. A l'inverse, si l'agriculteur est déjà très occupé et tire des revenus satisfaisants des terres et de l'eau dont il dispose, l'élevage de poissons ne présente guère d'intérêt pour lui. Certains agriculteurs aisés, toutefois, auront l'imagination, les ressources financières et l'énergie nécessaires pour poursuivre l'expansion de leur entreprise agricole en intégrant l'aquaculture à leurs activités de culture et/ou d'élevage. Rien ne permet encore de déterminer de façon précise le rôle joué parles pisciculteurs dans les communautés où l'aquaculture est destinée à assurer la subsistance. On peut envisager la spécialisation de certains dans la production d'alevins pour des tiers, au bénéfice de tous, mais il y a un risque que quelques pisciculteurs 'd'élite' s'approprient les principaux moyens de production et en viennent à dominer la production au détriment des autres. Ce risque est toutefois minime lorsque la pisciculture est intégrée car, dans ce cas, les facteurs de production externes sont très réduits. Quel avenir? Dans de nombreux pays ACP, les pratiques actuelles d'utilisation des terres et de l'eau ne permettent pas de satisfaire les besoins alimentaires et financiers des populations et sont préjudiciables à l'environnement. Une intensification de la production alimentaire s'impose mais sans son corollaire habituel, la dégradation de l'environnement. Le défi consiste donc à trouver un système qui concilie ces deux impératifs et qui soit à la portée, en termes de gestion et de ressources financières, des populations rurales démunies. L'intégration de la pisciculture à l'agriculture semble être une solution appropriée, à la fois respectueuse de l'environnement et intéressante pour les agriculteurs. Cependant, elle constitue un système de production nouveau dont certains aspects échappent totalement à la grande majorité des populations rurales des pays ACP. Son succès dépendra pour une large part de l'aide accordée par les pouvoirs publics pour la formation, la fourniture d'alevins au départ, le conseil en matière de gestion pendant la période d'apprentissage des agriculteurs et les encouragements aux plus démunis pour qui le système présente le plus d'intérêt. Les efforts que consentiront les pouvoirs publics dépendront de plusieurs facteurs, notamment des prévisions concernant la contribution de ce système à la croissance économique, sous forme d'accroissement de la consommation de poisson. Il faut toutefois prendre en compte un autre facteur économique, l'effet synergique sur la production alimentaire de l'intégration de la pisciculture à l'agriculture et ses conséquences bénéfiques pour l'environnement réduction, voire inversion, des phénomènes de dégradation. Pour en savoir plus * ICLARM MC P.O. Box 1501 Makati Metro Manila 1299 PHILIPPINES * IEMVT/CIRAD c/o CEMAGREF Domaine de Lavalette BP 5095 34033 Montpellier cedex 1 FRANCE * FAO Via delle Terme de Caracalla 00100 Rome – Italie