Le sel, la terre, l'eau et la pratique contemporaine de l'irrigation : approche historique des aménagements hydro-agricoles en Egypte

Le sel, la terre, l'eau et la pratique contemporaine de l'irrigation. Approche historique des aménagements hydro-agricoles en Egypte. L'exposé s'appuie principalement sur un article paru en 1995 dans la revue Sécheresse. Il fait ensuite référence aux évolutions récentes de l'agriculture deltaïque et des conséquences sur la gestion des terres et des eaux. La vallée du Nil peut être présentée comme une immense oasis dont l'existence dépend de la gestion d'une unique source hydraulique, partagée tout au long des segments de vallées et des quartiers du delta. Durant 5000 ans, l'alternance d'inondation et d'assèchement en profondeur des sols argileux permettait de drainer les sels alluviaux, condition primordiale de maintien de la fertilité. Le début des aménagements d'irrigation pérenne est contemporain. Dès 1820-1830, l'administration centrale dirigée par Mohammed Ali concentre ses efforts sur l'étiage du Nil, et réoriente les canaux d'épandage de crue en canaux surcreusés de répartition des basses eaux du Nil afin d'obliger les communautés paysannes à cultiver une nouvelle plante : le cotonnier. A la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle, une crise majeure touche la culture cotonnière et doit être imputée essentiellement à deux phénomènes concomitants: la salinisation des terres irriguées et le développement des parasites. Dans les années 1900-1920, Audebeau rend compte de ses expériences relatives à l'influence de la nappe souterraine sur les cultures. Pendant près d'un siècle, l'irrigation avait été pratiquée sans aucun réseau de drainage artificiel. A la suite de ces observations, l'Etat met en place un vaste réseau de drains à ciels ouverts. Après l'édification du Haut Barrage d'Assouan en 1964, l'intensification culturale entamée au XIXe siècle se poursuit avec la généralisation de la double culture annuelle. Encore une fois, l'effort des aménagistes sur l'irrigation se traduit par un retard sur le drainage devenu très insuffisant. Il faut attendre les années 1980-1990 pour voir le drainage réajusté à l'intensité des apports en eau. Cependant, les conditions économiques libérales de la fin du XXe siècle transforment à nouveau toute l'agriculture du Delta. En été, la riziculture domine. Le système de drainage est obstrué par les paysans. Le Ministère des irrigations perçoit très mal cet essor rizicole qui va à l'encontre de la politique d'extension des réseaux d'irrigation dans le désert. L'eau allouée aux anciennes terres aurait du diminué, La demande est en réalité en forte augmentation. Provisoirement, le barrage d'Assouan rempli au maximum permet de faire face aux contradictions. Mais en fait, sur le terrain, dans le delta, la répartition de l'eau est désorganisée, certaines mailles hydrauliques se reportent sur les eaux de drainage... salées et polluées. Un nouveau cycle de dégradation environnemental apparaît. Des enseignements utiles sur les risques de salinisation peuvent être dégagés pour comprendre ce qui peut advenir dans d'autres régions irriguées dans le Monde. (Texte intégral)

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Bibliographic Details
Main Author: Ruf, Thierry
Format: conference_item biblioteca
Language:fre
Published: CIRAD
Subjects:B50 - Histoire, F06 - Irrigation, P10 - Ressources en eau et leur gestion, P30 - Sciences et aménagement du sol, irrigation, histoire, conservation de l'eau, gestion du sol, delta, salinisation du sol, http://aims.fao.org/aos/agrovoc/c_3954, http://aims.fao.org/aos/agrovoc/c_3635, http://aims.fao.org/aos/agrovoc/c_8315, http://aims.fao.org/aos/agrovoc/c_7176, http://aims.fao.org/aos/agrovoc/c_2170, http://aims.fao.org/aos/agrovoc/c_35321, http://aims.fao.org/aos/agrovoc/c_29739, http://aims.fao.org/aos/agrovoc/c_2503,
Online Access:http://agritrop.cirad.fr/515404/
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Description
Summary:Le sel, la terre, l'eau et la pratique contemporaine de l'irrigation. Approche historique des aménagements hydro-agricoles en Egypte. L'exposé s'appuie principalement sur un article paru en 1995 dans la revue Sécheresse. Il fait ensuite référence aux évolutions récentes de l'agriculture deltaïque et des conséquences sur la gestion des terres et des eaux. La vallée du Nil peut être présentée comme une immense oasis dont l'existence dépend de la gestion d'une unique source hydraulique, partagée tout au long des segments de vallées et des quartiers du delta. Durant 5000 ans, l'alternance d'inondation et d'assèchement en profondeur des sols argileux permettait de drainer les sels alluviaux, condition primordiale de maintien de la fertilité. Le début des aménagements d'irrigation pérenne est contemporain. Dès 1820-1830, l'administration centrale dirigée par Mohammed Ali concentre ses efforts sur l'étiage du Nil, et réoriente les canaux d'épandage de crue en canaux surcreusés de répartition des basses eaux du Nil afin d'obliger les communautés paysannes à cultiver une nouvelle plante : le cotonnier. A la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle, une crise majeure touche la culture cotonnière et doit être imputée essentiellement à deux phénomènes concomitants: la salinisation des terres irriguées et le développement des parasites. Dans les années 1900-1920, Audebeau rend compte de ses expériences relatives à l'influence de la nappe souterraine sur les cultures. Pendant près d'un siècle, l'irrigation avait été pratiquée sans aucun réseau de drainage artificiel. A la suite de ces observations, l'Etat met en place un vaste réseau de drains à ciels ouverts. Après l'édification du Haut Barrage d'Assouan en 1964, l'intensification culturale entamée au XIXe siècle se poursuit avec la généralisation de la double culture annuelle. Encore une fois, l'effort des aménagistes sur l'irrigation se traduit par un retard sur le drainage devenu très insuffisant. Il faut attendre les années 1980-1990 pour voir le drainage réajusté à l'intensité des apports en eau. Cependant, les conditions économiques libérales de la fin du XXe siècle transforment à nouveau toute l'agriculture du Delta. En été, la riziculture domine. Le système de drainage est obstrué par les paysans. Le Ministère des irrigations perçoit très mal cet essor rizicole qui va à l'encontre de la politique d'extension des réseaux d'irrigation dans le désert. L'eau allouée aux anciennes terres aurait du diminué, La demande est en réalité en forte augmentation. Provisoirement, le barrage d'Assouan rempli au maximum permet de faire face aux contradictions. Mais en fait, sur le terrain, dans le delta, la répartition de l'eau est désorganisée, certaines mailles hydrauliques se reportent sur les eaux de drainage... salées et polluées. Un nouveau cycle de dégradation environnemental apparaît. Des enseignements utiles sur les risques de salinisation peuvent être dégagés pour comprendre ce qui peut advenir dans d'autres régions irriguées dans le Monde. (Texte intégral)